mardi 2 décembre 2008

Faut-il craindre Poznan ?


La conférence des parties à la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques a débuté depuis hier, lundi 1er décembre. Cette conférence est partie intégrante d'un long cycle commençait en 1992 visant à trouver un accord mondial en vue de réduire de façon drastique nos émissions de gaz à effet de serre, et cela en vue de limiter les changements climatiques et les conséquences que l’on connaît (Rapport Stern, ou partie 4 du rapport AR4 du GIEC). Pour faire plus simple et plus imagé, nous décidons aujourd’hui, 12 jours tous les ans, du temps qu’il fera dans 50 voire 100 prochaines années. L’enjeu est donc de taille…

Bien que les enjeux se situent dans un terme très long, les conférences sur le climat sont influencées par des micro ou macro-événements qu’il convient de rappeler dans cette première semaine de conférence.

Premièrement, et ce n’est pas une révélation que je vous fais là, la conférence se déroule en Pologne. Et cela a toute son importance lorsque l’on sait que le ministre de l’environnement du pays-hôte siège à la tribune de la CoP et a un rôle capital dans le succès ou l’échec des négociations. C’est notamment la raison pour laquelle, le Danemark (prochain pays-hôte de la conférence en 2009) s’est doté récemment d’un ministre des changements climatiques. Or au sein de l’Union Européenne qui dessine en ce moment même son « paquet énergie/climat », la Pologne joue un jeu plus que surprenant pour ne pas dire inquiétant (je vais rester diplomate, je n’ai pas encore passé la frontière). En effet, l’électricité polonaise est majoritairement produite grâce au charbon, ressource dont le pays regorge en abondance. Cependant, le charbon est une catastrophe climatique, son bilan énergie produite par rapport au CO2 émis (en gCO2/kW) en fait probablement l’énergie la plus émettrice de CO2. Dans une interview récente, le Premier ministre polonais se disait même prêt à utiliser l’arme du veto lors des discussions européennes pour préserver ses intérêts charbonniers. Comment un pays qui tient une telle position peut-il permettre de faire avancer les négociations sur le climat ? Souhaite-t-il seulement qu’elles avancent ?
Il faut ajouter à cela que l’Union Européenne peine à trouver une voix commune sur la question climatique. L’UE qui était l’année dernière l’un des moteurs des négociations à Bali offre cette fois l’image d’une cacophonie assourdissante ; les uns voulant préserver leur industrie automobile, les autres leur charbon. L’intérêt national ayant de loin supplanté l’intérêt européen et d’encore plus loin l’intérêt mondial et futur

Deuxièmement, ou devrais-je dire principalement : la CRISE ! La crise, la crise, la crise. On la nomme tellement que l’on aurait presque oublié de quoi il s’agissait. L’obscur crédit et le jeu des traders ont des conséquences que l’on ne soupçonnait pas au début de ladite crise. Les États du monde entier ont du jouer aux pompiers économiques et financiers en offrant à perte des centaines de milliards de dollars pour sauver banques de détail et banques d’affaire, groupes immobiliers et autres assureurs de crédit.
Les crédits dépensés pour sauver le système financier international n’iront donc logiquement pas en direction d’autres opérations. Le débat parlementaires sur la loi Grenelle en France et la réaction des maires (lors du congrès des Maires de France) sont à cette image, la loi est belle et bien écrite, mais on manque totalement de moyens financiers pour la mettre en œuvre. L’exemple choisi est français, mais il se retrouve dans tous les autres pays industrialisés du Monde.

Crise et absence de réels leaders dans les négociations sont autant de raisons réelles de s’inquiéter. Monsieur Pierre Radanne (consultant international, et ancien directeur de l'ADEME) disait aujourd’hui au journal Le Monde que la CoP de Poznan servirait à recoller les différents morceaux sur le climat pour aboutir à un accord en 2009 à Copenhague. En langage diplomatique décrypté : à Poznan, il n’y a rien à voir et préparez-vous à l’échec.

Le tableau dressé semble celui d’un échec total. Un élément pourtant doit être rajouté à ce tableau, petite touche du nouveau président américain. Durant ces huit dernières années de présidence de G.W. Bush, les négociations sur le climat avançaient à reculons, le président américain ne voulant pas sacrifier l’économie américaine (en passant, il ferait bien de lire le rapport Stern et le récent rapport de l’OIT sur la transformation écologique de l’économie) sur l’autel du climat. Or, tout au long de sa campagne, Barack H. Obama n’a eu de cesse de rappeler qu’après son élection, les USA auront un rôle de leader sur les questions climatiques et demanderont la mise au point d’un accord international ambitieux portant sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Malheureusement, B.H. Obama ne sera président des Etats-Unis d’Amérique qu’à partir du 20 janvier, et ne sera que représenté par des observateurs avec à leur tête John Kerry. La délégation présente à Poznan sera donc celle de l’administration actuelle, dont on connaît les « réticences » climatiques.



Il ne reste donc plus qu’à espérer que l’effet Obama aura une influence réelle sur la conférence et les négociations attenantes. Il est quand même difficile d'admettre lorsque l'on a qu'une vingtaine d'années et l'avenir devant soi que le futur ne repose que sur un effet espéré...


« Yes, we can »

I hope so.

La position d'un député français au parlement européen.

Pour compléter ce que vient de d'écrire Augustin sur les négociations au niveau européen, je voudrais partager avec vous la position sur ce sujet d un de nos députés au parlement européen.

Les membres de la délégation française ont écrit à chacun des députes européens pour insister sur la nécessité d'une position forte de l'Union Européenne dans la lutte contre les changements climatiques. Nous avons utilise le message propose sur le site www.timetolead.eu (ce site est consacre aux négociations du paquet climat/énergie européen, allez y faire un tour si vous avez 2 minutes).

Voici mon email a M. Vatanen (UMP):
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Cher Monsieur Vatanen

Pour que l'Europe se place en tête de file dans la lutte pour maintenir le réchauffement climatique en-dessous des 2°C, nous devons impérativement adopter les mesures suivantes:
1) Un minimum de 30% de réduction des émissions de gaz à effet de serre (sur le territoire européen et non outre-mer par le biais de rachat de crédit de carbone);
2) Des mesures fortes afin d'assurer que chaque Etat membre respècte ses engagements en matière d'émission;
3) Une aide financière suppplémentaire afin de permettre aux pays en voie de développement de réduire leurs émissions.

Allez-vous montrer l'exemple en assurant l'adoption de ces mesures dans le Paquet climat/énergie européen?

Sébastien DUYCK
(électeur dans la circonscription France Sud-Est)

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Et voici sa réponse (je pense que cela se passe de commentaire tellement elle me parait décalée de la réalité).

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Monsieur,

Merci pour votre message bien intentionné. Avant de prendre des mesures contraignantes dans le domaine des émissions de gaz à effet de serre, et afin d'éviter de sombrer dans une rhétorique catastrophiste sur le changement climatique, nous devons trouver des réponses rationnelles aux trois questions suivantes:
1) Est-ce que le gaz à effet de serre est effectivement à l'origine d'un accroissement des températures globales de façon particulièrement élevée par rapport aux précédents cycles de réchauffement climatique?
2) Est-ce que ce présupposé réchauffement climatique affecterait sévèrement le bien être de l'Homme et la nature?
3) Est-ce que des actions rationnelles de l'Homme pourraient avoir un effet préventif sur un quelconque réchauffement climatique?
Les réponses à ces questions ne sont pas si évidentes que le courant de pensée actuel le laisse croire...

Sincères salutations,
Ari Vatanen
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Pour être équitable avec M Vatanen, je dois ajouter que sur les quelques 34 députés auxquels j ai adresse cet email, deux seulement ont répondu jusqu'à présent...
(Pour memoire, il y a de nouvelles elections pour le parlement europeen dans 6 mois).